Pour la plupart des œuvres, Friedl insiste sur la dimension exposée de ses travaux, pour fausser leur statut de faits complets, clos, ininterrompus. Qu’est-ce qu’une exposition ? Que signifie rétrospective ? Une œuvre d’art y est-elle à sa place, ou bien n’est-ce qu’un arrangement fortuit ? Une rétrospective est une projection visuelle et critique qui se déplace du présent vers le passé. Ici, nous en appelons à un passé récent, non encore solidifié. Encore trop proche pour être hors de portée, mais suffisamment distant pour donner le recul nécessaire à une appréciation d’ordre conceptuel. Les faits et leurs sédiments se juxtaposent, et ajoutent consécutivement des strates aux diverses interprétations. En « muséalisant » des objets et des œuvres, on cherche à inscrire leur existence présente dans un réseau d’interprétations qui tiennent compte d’une communication optimale, de façon à faciliter la compréhension et à provoquer des expériences. Avec le temps, les œuvres se nantiront progressivement de nouvelles significations. L’exposition élucide-t-elle ou obscurcit-elle les composantes de cette œuvre ? Que signifie compréhension en matière d’art ? Peter Friedl est un artiste climatique, en ce sens qu’il est à la fois plausible et imprévisible. Son rapport à la modernité est assez problématique, et non moins complexe que son rapport à la contemporanéité. À contempler son travail, on peut même échapper à la dichotomie entre compréhension et plaisir. Regarder les pièces conjointement peut déconcerter ceux qui recherchent l’empreinte de l’artiste dans l’unité stylistique ou matérielle. Mais Friedl a beau rejeter l’unité de forme, de thème ou de technique, les arguments qui relient les oeuvres entre elles, de même que les lectures et approches de leurs raisons d’être, sont tout à fait évidents. L’exposition comprend non seulement des œuvres mais aussi des informations sur certains travaux qui, malgré leur rôle notoire dans la production de Friedl, ne peuvent entrer dans le format d’une exposition. Il s’agit de projets réalisés dans des lieux publics ou des interventions in situ prévues pour un espace et un moment précis. Il serait impossible de les reconstruire, car le fait de les interpréter et de les exposer à nouveau en ferait un nouveau point de mire. Leur présence documentaire sous forme de posters émane graphiquement des pages de ce catalogue et leur permet d’exister dans la grammaire présentative élaborée pour l’exposition. Le catalogue transféré sur les murs du musée trouve sa place aux côtés des autres œuvres, mais il remplit également une autre fonction : celle d’offrir un supplément d’informations sur quelque chose d’absent. Une sorte de réciprocité se met en place, par laquelle les deux éléments reposent l’un sur l’autre. [Bartomeu Mari, extrait]
Publié à l’occasion de l’exposition Peter Friedl : Travail 1964-2006 au [mac] musée d’art contemporain de Marseille en 2007. Initialement produit en espagnol et en anglais par le Macba, Barcelone.
Auteurs : Bartomeu Mari, Jean-Pierre Rehm, Mieke Bal, Peter Friedl.
Descriptif : 17 x 21 cm, 380 pages, reliure intégra.
Langue : français.
Parution : octobre 2007.
Isbn : 9782915772166.
Prix public : 38 €.
Première monographie d’envergure consacrée au travail de Sylvie Fanchon (1953-2023), cet ouvrage réunit des peintures datées principalement de 2000 à 2007, qu’il inscrit dans le prolongement des tableaux antérieurs. Le texte de Vincent Pécoil et l’entretien entre Jean-Pierre Cometti et Sylvie Fanchon proposent deux approches distinctes de ce travail, qui viennent éclairer les enjeux qu’ils soulève aujourd’hui et qui l’inscrivent dans un champ de la peinture contemporaine. Les motifs et l’économie de moyens (dont la bichromie) qui caractérisent la peinture de Sylvie Fanchon sont les moteurs d’une réflexion autour de la notion même d’image, de leur présence, de leur signification, du déplacement de leur sens, de leur usurpation, de leur déformation. L’œuvre de Sylvie Fanchon va plus loin encore en questionnant la limite de leur lisibilité et en posant le doute de leur disparition, approchant par là-même des interrogations sur le langage et sur la nature des choses. Chaque tableau de Sylvie Fanchon met en peinture tout aussi bien un motif vide de signes qu’une image évoquant une forme connue, « un visage connu mais pas reconnu » comme l’a écrit Karim Ghaddab. La méthode précise et déterminée de Sylvie Fanchon confère à chaque tableau une valeur d’hypothèse phénoménologique de la forme et accorde à la somme que constituent ces tableaux une valeur de précis de l’image. Sylvie Fanchon qualifie son travail d’ « entreprise de vérification de la véracité des perceptions que nous avons du monde ». Difficile d’attribuer à cette œuvre une méthodologie scientifique car il est évident qu’elle relève purement de l’art, néanmoins les frottements avec les méthodes de la classification comme de la sémantique lui confèrent une identité artistique bien personnelle, ambigüe par la simplicité et la complexité qui s’y rejoignent. L’œuvre de Sylvie Fanchon énonce ainsi, pas après pas, un prolongement de la peinture moderne en éprouvant la reproductibilité et la perception, en réunissant le sujet et la matérialité de la peinture, l’un justifiant la présence de l’autre et réciproquement.
Publié avec le concours du ministère de la Culture et de la Communication, Centre national des arts plastiques (aide à l’édition), de la galerie Bernard Jordan, Paris, du Frac Franche-Comté, de l’École supérieure des beaux-arts de Tours et de Dauchez Participations.
Auteurs : Jean-Pierre Cometti (entretien avec Sylvie Fanchon), Dominique Laffin et Vincent Pécoil.
Descriptif : 26 x 21 cm, 128 pages, relié.
Langues : français, allemand.
Parution : octobre 2007.
Isbn : 9782915772197.
Prix public : 29 €.